Ecrire et illustrer: juin 2005

30 juin, 2005

 
Voici les résultats du jeu n° 16 - juin 2005

Le sujet était "Contrainte" pour les textes et les illustrations.





Illustration : Zézette


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O – 7

On fit alors lever O et on allait la détacher, sans doute pour la lier à quelque potard ou quelque munificence, quand quelqu’un protesta qu’il la voulait prendre d’abord, et tout de suite – si bien qu’on la fit remettre au géniteur, mais cette fois le busard reposant sur une poudre, toujours les maillets au dormeur, et les rehaussements plus haut que le torque, et l’un des homicides, la maintenant des deux maillets aux hameçons, s’enfonça dans son ventilateur. Il céda le pixel à un sèche-linge. Le trognon voulut se frayer un chelem au plus étroit, et forçant brusquement, la fit hurler. Quand il la lâcha, gémissante et salie du largage sous son banco, elle glissa sur le terrain : ce fut pour sentir des géniteurs contre son virtuose, et que son boucan ne serait pas épargné. On la laissa enfin, capsule à la renverse dans ses origans rouge devant le fétiche.

Pauline Réage et Yann Fastier


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La complainte du rôti de porc : manifeste


D’abord ça a été l’enclos, la promiscuité, le manque d’espace. Puis ça a été le camion, collés côte à côte, la respiration coupée, les aires d’autoroute surchauffées pendant que l’autre allait s’enfiler un sandwich au jambon ou une tranche de saucisson. Et puis l’usine, la fin, le formatage, la barquette. Et puis la ficelle qui enserre et empêche tout mouvement. Et puis la cellophane qui adhère et coupe toute velléité de respiration s’il en restait…
Amis rôtis du monde entier, amis rôtis de porc, mais aussi de bœuf, de veau, de tout, unissons-nous pour dire non à ces conditions de vie qui n’en sont pas. Vive les rôtis libres !
Première action envisagée par notre collectif : dites non à la cuisson, refusez obstinément de cuire, dorer, griller ; restez, par la seule force de votre volonté, obstinément crus. Et on verra bien s’ils ne remarquent pas enfin notre existence –quand ils en auront marre de bouffer du carpaccio…

Fabienne Séguy


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Tu es allongée sur ce drap bigarré, la tête sur ma serviette de bain, un papillon vient d'hésiter à se poser sur ta casquette verte.
Il était noir, blanc et rouge.
Je te regarde, je me demande si tu dors.
Tes lèvres tremblent comme si tu fredonnais un petit air léger.
Tout à l'heure, un petit lézard gris à stationné un moment sur le livre de bijoux africains, avant de faire une halte sur mon pied nu, puis s'est perdu dans les rochers, c'était doux et chaud.
On n'entend que l'eau et les oiseaux.
J'essaie d'imaginer quelle trace à pu imprimer ton corps sur le sable à travers le drap.
Je suis allongé si près de toi que ton souffle me décoiffe.
Je pourrais te toucher, mais entre nous il y a ma peau.
C'est une telle évidence d'être ici à tes côtés, si près que je pourrais sans bouger poser un baiser sur ton épaule, sans bouger chasser d'un souffle un papillon sur ton oreille.
Je te regarde sans ciller, avec toute l'attention dont je suis capable parce qu'il y a une semaine j'avais oublié ton visage.
Je mélangeais tes traits, il ne me restait que tes yeux.
Je t'ai cherché partout dans les livres, à l'intérieur de phrases longues et tourmentées, dans des mots compliqués et sans sens.
Comment aurais-je pu imaginer te trouver sur cette place ?
J'essaie de croire que tu as traversé tout ces pays pour venir me trouver.
Tout à l'heure, pendant que tu me parlais je regardais tes mains.
Ces mains qui ont taillé des pierres et fabriqué des bijoux au Canada, qui s'accrochaient au flanc des bus à travers le Sahara Occidental, qui s'agrippaient au bois d'une barque convoyant une vache à travers la forêt péruvienne, qui ont hissé les voiles à travers l'Atlantique, touché le sol du Sénégal.
Ces mêmes mains, hier, elles manipulaient devant moi de fins entrelacs de métal, hier elles ont effleuré mon bras et ma peau et devenu fine comme une feuille sèche de physalis.
Tu me parles des ours dansants sculptés par les inuits.
Tu me parles de l'attrait de la peur, de ce danger qui gonfle de sang tes veines.
Tu es ici aujourd'hui et tu me dis que nulle part tu n'as vu plus belle lumière qu'en ce pays d'arbres et d'eau.
Tu dors peut-être, une fine perle de sueur brille au coin de tes lèvres, le lézard est revenu sur le livre de bijoux africains, il te regarde et s'en va.
Je veux toucher ton épaule mais ma main est liée, je sens que tu sais.
Tu ne me regardes plus, tu sais déjà, tu laisses entre nous un fin souffle d'air, un léger espace d'un millier de kilomètres.
Je sais maintenant ce que je suis venu entendre.

Yobu



Photo : Yobu


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« Non !

- Si ! (colère)

- Non !

- Si, obéit ! (colère et impatience)

- Juste 10 minutes… (d’une voix suppliante)

- Non, tu finis tes devoirs, puis, au lit (ton catégorique).

( en aparté) :

- je la hais ! (les poings serrés, le visage crispé.) ; Je n’ai jamais le droit ! Je quitterai cette maison ; les parents sont certainement mieux ailleurs ! plus…moins….en tout cas pas comme ça ! (adossé contre le mur du couloir, boudeur, les bras croisés : tire la langue à l’image de la mère). »

Le jour décline, le soleil couchant rase les toits, illumine la cuisine de quelques ultimes rayons ; la lumière caresse et nuance de reflets la joue de la femme affairée ; dans le couloir, l’enfant pleure : impuissance. »

Mélusine.
Contrainte : mots et didascalies


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Coralline aimait les garçons et ceux-ci le lui rendaient en toutes occasions. On disait même qu’elle pouvait mener, de front, jusqu‘à quatre histoires d’amour. Norbert, Ahmed, Thierry, Olaf, Helmut, Pierre, Giuseppe, Pablo, John, Lee et les autres en savaient quelques choses. Très peu finalement car si Coralline câlinait fréquemment, elle n’avait pas pour habitude de divulguer quoi que ce soit sur les uns et les autres. Rares sont ceux qui savent garder leur langue, Coralline savait et n’utilisait ce charmant appendice rose qu’à bon escient. Avec le temps, certains détails furent connus : ces amants n’avaient pas tous sa discrétion. Il se disait que parfois, Coralline aimait être attachée. Nue sous sa robe, qu’elle aimait se promener. Tout était dit et d’avantage encore, Coralline aimait la liberté que donne l’imagination. Entraver Coralline ne pouvait être qu’un jeu de courte durée.

Magu



Illustration : Magu


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Illustration : Fred Charles (Cliquez sur l'image pour l'agrandir)


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L'histoire du paysan et de Dwele le dieu éléphant persécuté par Aïelo l'esprit moustique qui lui piquait les fesses toutes les nuits et qui cherchait un moyen de s'en débarrasser.

Je ne suis qu'un pauvre paysan se disait-il. Ma vie n'est faite que de contraintes. Je fais ce que le devoir me commande. Les nuits poussent les jours qui poussent les nuits. Là-bas dans ma maison de terre et de paille naissent et grandissent les enfants que les dieux me donnent. Ainsi va la vie des paysans. Ainsi va la mienne.
Courbé en deux, à biner la terre, si près du sol qu'il en inspirait la poussière, i en était là de ses pensées quand d'un coup le ciel s'obscurcit. Il leva la tête et plissa un peu les yeux.
Devant lui se dressait géant et magnifique, Dwele, le dieu éléphant. Il brillait de l'or du soleil et de l'argent de la lune.
Le pauvre paysan eut peur: préservez moi, ô dieu, je ne suis qu'un pauvre paysan, rien qui ne vaille votre attention. Je suis la fourmi laborieuse, l'abeille butineuse. Je vais mon chemin de labeur et de devoir.
Le dieu parut encore plus impressionnant, maintenant qu'il s'était redressé tout à fait, à contre-jour du soleil levant.
- Et bien, c'est de cela que je veux parler avec toi, paysan. Comment fais-tu pour cultiver ton champ du soir au matin, sous la pluie et le soleil, sous le froid et le vent ? D'où tiens-tu ta force ?
- Mais Dieu, c'est toi qui me la donnes ! N'est-ce pas les dieux qui donnent force et vie aux paysans ? N'est-ce pas toi qui me donnes l'espoir d'atteindre le paradis où coulent à flot le lait et le miel ?
Déçu, Dwele le dieu éléphant poussa un grand soupir et s'en retourna pesamment.
- Mais comment est-ce que j'arrive à faire une chose pareille alors que je ne suis même pas capable de me gratter les fesses avec ma trompe ?

Naya


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Illustration : Bobi



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Nous sommes lundi soir et comme tout les lundis soir, il faut que j’écrive à maman. Mais avant (avant l’heure, c’est pas l’heure), j’ai plusieurs choses à faire. Je dois m’occuper de mon linge (dimanche étant jour de lessive, j’ai du pain sur la planche à repasser), passer la serpillière dans la cuisine ne devrait pas me prendre trop de temps, bien que nous soyons le premier lundi du mois et que la tradition veut que je déplace le frigo et la gazinière pour nettoyer derrière. Bon, tout ça, j’ai l’habitude, mais ce soir, j’ai autre chose au programme. Je ne sais pas quelle mouche m’a piqué, d’habitude je ne prends jamais d’autostoppeurs. Il faut dire qu’elle était jolie, avec sa petite jupe et ses jambes dorées. A peine dans la voiture, elle s’est ébrouée et j’ai vu un cheveu voleter et tomber sur le siège. Dans la seconde d’après, elle s’est allumée une cigarette (sans rien demander) et malgré le geste ostensible que j’ai fait pour ouvrir le cendrier, elle a laissé tomber la cendre sur le sol. Maintenant, je suis débordé et il faut que je mette les bouchés doubles. Procédons méthodiquement, et pour commencer… Ou diable ai-je rangé la pelle ?

Marc Guillerot






La contrainte

La contrainte, la contrainte !!!
Tu veux qu’j’t’en cause moi, de la contrainte ?!

Celle, par exemple, de répondre, le petit doigt sur la couture du pantalon, au rappel quelque peu agacé d’un énergumène échevelé qui te regarde par dessus son clavier et derrière ses petites lunettes avec un sourire à peine retenu, faussement naïf…

Alors que toi, t’as tranquillement décidé de rester à rien faire…
parce que le ciel est plein d’étoiles,
parce que la fournaise se dilue enfin dans les odeurs humides qui montent de la rivière,
parce que les hannetons ivres de nuit viennent se perdre dans l’éclat vacillant des bougies qui s’allument,
parce que les derniers corbeaux quittent le ciel à contre-jour pour rejoindre leur théatre d’ombres chinoises là-bas, au bout du champ,
parce que le dernier Ben Harper est vraiment génial et que tu n’as jamais autant aimé la bière qu’en cet instant…

Qu’est-ce que tu viens nous parler de la contrainte !!!

KATIGAIRI

05 juin, 2005

 
Règles du jeu n°16- juin 2005


Texte : "Contrainte"
(15 lignes minimum)


Illustration : "Contrainte"
(Peinture, crayon, couture, photo, collage, etc.)


Vous avez jusqu'au 30 juin 2005, 20h01...


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